Légende - David Gemmell

« Le Comte et la Légende seront ensemble sur le mur. Et les hommes rêveront, et les hommes mourront, mais la forteresse, tombera-t-elle ? »
[Prophétie du devin, p20]

LE roman d’heroic fantasy que j’attendais de lire. Je me suis aperçue pour mon plus grand plaisir qu’il ne s’agissait que du premier tome du cycle drenaï. Cette histoire se déroule dans un univers médiéval dont les raccords avec notre propre monde sont souvent perceptibles, nous permettant de manipuler fantastiquement l’Histoire et de nous faire une idée assez précise des peuples en présence. Les Drenaï sont fortement apparentés aux Européens, mais leurs envahisseurs, les Nadirs, ressemblement furieusement aux Mongols et leur chef à Genn Gis Khan. Quant aux Sathulis, ce sont des musulmans à la sauce fantasy.
Ce roman fortement épique raconte la résistance de la forteresse de Dros Delnoch (un nom qui sonne magnifiquement bien à mes oreilles) contre l’invasion des Nadirs venus du Nord qui doivent franchir la vallée étroite barrée par la forteresse avant d’investir l’empire Drenaï. David Gemmell est le romancier des causes perdues et des héros. En conséquent je ne vous cacherai pas qu’il faut apprécier ce genre, car si vous n’aimez pas les batailles vous risquez de vous ennuyer. Et encore, je n’en suis pas certaine. Car ce roman n’en reste pas moins un excellent récit, haletant et fort. Il m’arrive souvent de tester l’efficacité d’un roman à mes réactions disons… physiques. Eh bien là, comme cela m’arrive somme toute assez rarement, j’ai ris de bon cœur, et pleuré à chaudes larmes.
C’est que David Gemmell est diablement efficace. C’est l’un de ces auteurs qui a le don du mot juste. Il lui suffit de quelques adjectifs pour cadrer un décor et une ambiance. Son talent réside aussi dans la création de ses personnages. Si vous vous attendiez à un bête roman narrant l’histoire du brave chevalier défendant la veuve et l’orphelin contre le maléfique barbare, vous allez être déçu. C’est une aventure humaine. L’auteur nous dit que chaque personne possède de nombreuses qualités, et que celles-ci se révèlent ou non selon ce que nous réserve la vie. Eh bien c’est exactement ce qui se passe dans le roman : des hommes se révèlent, dans la situation extrême qu’est un champ de bataille. Voici un rapide tableau des personnages principaux : un berseker amoureux qui a peur de la guerre, un guerrier du type ultra-bourrin mais tout de même gentil - terriblement attachant en fait – des moines combattants aux grands pouvoirs mentaux, une jeune femme fragile plus à l’aise en compagnie des hommes que des femmes et maladroite en amour. Différents guerriers pour différentes histoires, tous réunis pour la défense de Dros Delnoch. Et ne croyez pas qu’ils y vont tous pour la gloire et la patrie. Ils y vont par défaut, comme Gilad qui s’ennuie dans sa vie de fermier avec une femme qu’il n’aime pas, ils y vont pour traquer la mort, comme le vieux guerrier Druss la Légende, pour suivre une femme, comme Regnak, pour y chercher un accomplissement spirituel, comme les moines guerriers.
Et on les aime, ces personnages. D’où le fait qu’on pleure beaucoup. Parce que c’est une guerre, et que beaucoup vont mourir.
C’est un beau roman, qui réserve plusieurs surprises dans son déroulement ; on est emporté jusqu’au bout, jusqu’au bout de cette histoire empreinte de fatalité, où chacun est conduit dans ses derniers retranchements, poussé finalement à faire le choix entre la vie et la mort. C’est émouvant et bourré d’action, impossible de s’y ennuyer ou de relâcher la tension, car tout s’enchaîne sans temps mort. On s’y amuse beaucoup, et si vous avez besoin d’évasion, soyez sûrs que vous serez emportés bien loin de chez vous. En un mot, vous rêverez…

« Je me suis battu à la passe de Skeln quand tout le monde disait que nous étions vaincus. On disait que les probabilités étaient contre nous, mais je les ai envoyées paître ! Car je suis Druss et je n’a jamais été vaincu, ni par les Nadirs, les Sathulis, les Ventrians, les Vagrians ou les Drenaïs. Et par tous les dieux et les démons de ce monde, je vais vous dire ceci : je n’ai pas l’intention d’être battu aujourd’hui non plus ! »

Qu’on se le dise…

j'avais bien aimé Légende et le cycle de Drenaï ( en particulier les deux premières aventures de Waylander[/b]. Il était assez fort comme roman mais la fin m'avait un peu déçu.

Moi aussi j'ai été un tout petit peu déçue par la fin, mais je crois que c'est surtout parce qu'elle clôt très rapidement une histoire que j'ai dévorée! Je rejoins complètement Mu sur son commentaire, et je ne pense pas que l'on ait besoin d'être un fan de récit de bataille pour le lire : ce n'est pas spécialement mon truc, mais là j'ai adoré, et ce pour une raison : les personnages! Cela faisait longtemps que je n'en avais pas accompagné de si vivants et de si attachants!
De plus, le sujet est moins la bataille, que les guerriers. Qui sont ces gens qui vont se battre pour sauver une citadelle qui n'a aucune chance? Pourquoi sont-ils là, qu'attendent-ils, en quoi croient-ils, quelles sont leurs faiblesses et leurs qualités? C'est un roman qui parle des hommes, et c'est pour ça qu'il est passionnant.