Les Chemins de Traverses
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Pouchkine, Gogol... et Elric

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Pouchkine, Gogol... et Elric Empty Pouchkine, Gogol... et Elric

Message  Kalys Jeu 28 Juil - 13:49

Pouchkine, Gogol... et Elric 9782253039273-G
Je crois que tout amateur de nouvelles fantastiques, telles que les Français les composaient au XIXe siècle, devrait savourer avec un vif plaisir ce court récit de Pouchkine : La dame de pique. Voilà de quoi il retourne : lors d'une soirée, Tomski raconte la façon dont sa grand-mère s'est, un jour, acquittée d'une dette. Cela se passait à Paris, à la toute fin du XVIIIe siècle. Ayant perdu au jeu et se retrouvant sans le sou, elle alla consulter son ami, le comte Saint-Germain. Nul ne sait ce qu'il lui chuchota, mais le lendemain, elle abattit trois cartes gagnantes et récupéra le montant de sa dette. Après quoi, elle ne joua plus jamais.
Hermann est un jeune officier du génie, qui vit chichement. En entendant cette histoire, il devient vite obsédé à l'idée de percer le secret de la vieille dame. Par le truchement de la pupille de celle-ci, il finit par s'introduire chez elle, afin de lui soutirer l'information.

Il s'agit là d'une anecdote, qui s'achève sur une conclusion purement informative, comme pour étayer à la fois la réalité (c'est arrivé et voilà comment cela s'est terminé) et son improbabilité : une histoire que l'on murmure le soir autour d'une table, avant de s'en retourner à des préoccupations plus quotidiennes. Il y a là une sorte de mise en abîme, puisque le prétexte de cette intrigue est déjà une anecdote, contée pendant une partie de cartes ; laquelle anecdote frappe suffisamment l'imagination de l'un des convives pour qu'il la reproduise... Et le voilà lui-même devenu le protagoniste d'une petite histoire mise en scène par notre narrateur.

Si chez Dostoïevski, le crime est puni par le remords, chez Pouchkine, pas de rédemption, mais une sorte de hasard ironique qui fait tout le sel de cette histoire un brin cruelle. Par contre, le thème de l'obsession est commun aux deux auteurs.
Ici, le surnaturel ne s'explique pas, et la morale, si elle existe, n'est pas claire. J'ai pensé à Maupassant, pour l’atmosphère générale, à Gogol également. Mais il y aussi, dans cette nouvelle, un fond symbolique très riche, très fort. Avec une subtilité diabolique, Hermann est amené à passer dans l'autre monde, lui qui, dès le départ, revêt aux yeux des autres un caractère psychopompe... D'après ce que j'ai lu, ces aspects-là sont encore plus mis en évidence dans l'opéra que Tchaïkovski a tiré de ce récit, une œuvre beaucoup plus tragique.

PS : je vous conseille vivement de le lire dans l'édition dont j'ai ajouté l'image : les notes sont très instructives, très simples et souvent marrantes.


Curieux texte également, Le journal d'un fou, de Nicola Gogol. Un texte court et fort poétique - notre homme a la démence surréaliste. La façon dont s'opère le glissement sémantique est virtuose. A chaque ligne la vraisemblance se froisse, le monde parait bien étrange, tout à coup... On rit un peu de l'absurdité des propos, mais on est glacé, surtout, par ce point final qui s'abat comme une condamnation.


Enfin, j'ai lu Les buveurs d'âme, une nouvelle aventure d'Elric contée en français par le grand Moorcock et l'implacable Fabrice Colin, le type dont la bibliographie est si longue que vous ne savez plus en la lisant si vous avez honte d'être un flemmard ou si vous êtes jaloux de sa prolixité. Bref Smile
J'ai retrouvé avec plaisir tout ce qui m'avait fait lire aussi avidement les autres volumes : les descriptions concises mais baroques, l'univers haut en couleurs et un Elric pas au mieux de sa forme mais auquel on pourrait - presque - s'identifier. Entendre par là que quand il n'utilise pas Stormbringer, il ressent des choses plus faciles à partager que l'ivresse meurtrière.
Cette histoire m'a paru plus anecdotique que ne l'étaient, dans mon souvenir, les autres épisodes. Il n'y avait pas ce souffle épique... Ramené à sa condition humaine, Elric n'est plus un héros, il n'est plus la figure terrible dont on conte les exploits, des siècles après, en y attachant un fonds symbolique. Mais je n'ai pas boudé mon plaisir : ç'aurait été comme refuser les avances d'Eric (Tru Blood) sous prétexte qu'un vampire est plus séduisant vilain que gentil Very Happy.
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