Le manque d'inspiration

C'est un sujet qui revient souvent dans nos discussions... Et au-delà de cela, le découragement, le manque de motivation, l'impression d'être dépassé par la tâche... En y réfléchissant un peu, et en comparant mon expérience avec celle d'autres écrivains, j'ai compris que ces problèmes venaient en partie, pour ma part, d'une absence totale d'organisation. J'ai compris qu'il était normal que si j'ouvrais mon traitement de texte, tout d'un coup, en me disant, maintenant, tu écris ; ça ne risquait pas de fonctionner. De nombreux écrivains me l'ont dit : toujours avoir une idée en tête avant de commencer à écrire. Sauf, évidemment, quand on a justement un coup d'inspiration, une envie furieuse, et qu'on développe spontanément un texte (lequel est, vous l'aurez sans doute remarqué) parfois assez difficile à réinsérer par la suite. Faire des plans, se définir un programme, ne peut pas faire de mal. Savoir ce que l'on veut faire, plutôt que de ne compter que sur les illuminations. Là, je parle surtout du roman, qui nécessite une grande ténacité, et plus de suivi pour ne pas se perdre en route. En fait oui, je pense que si on fait l'effort de cadrer un minimum son travail, et qu'on cherche à y instaurer une certaine régularité (car effectivement, comme je l'ai lu quelque part, plus on progresse, et plus on a envie d'écrire), les choses se débloquent, et on est plus serein. Qu'en pensez-vous ? Avez-vous changé votre fonctionnement suite à des déconvenues ?

Je me définis volontiers comme une balle rebondissante coté créatif, ayant de moi à moi une force d'inertie assez démente, mais étant toujours près à rebondir sur une idée, et à la martyriser jusqu'à en sortir un truc qui me convienne. Mon principal problème étant donc de créer l'impulsion.

Le roman, c'est un peu comme monter une série de tableaux cohérente pour moi, mes créas impulsives (je n'y échappe pas, quand même) n'y trouveraient pas leur place, et ça demande d'intégrer de la méthode...

Ma méthode, c'est la contrainte. Je me fixe des contraintes qui vont me faire galérer, non pas par masochisme, mais parce que le fait de les enfreindre devra alors résulter d'une réelle utilité, plutôt que de l'automatisme ou de la facilité. Par exemple, en ce moment, une contrainte de format (35x60), incontournable, éviter de tomber dans le trop glauque (contrainte vague mais très intéressante, qui m'évite pas mal de gratuité dans le domaine), et surtout... Ne pas utiliser de noir (Ce qui est proche de l'horreur pour moi). Le thème sur lequel je bosse étant déjà relativement défini, ces entraves me détournent un peu de l'objectif final (finir ces p*tain de 20 formats) comme étant l'élément insurmontable, et m'obligent à ruser pour la composition, etc.

Ça me fait aussi une matière à penser en permanence, étant donné que je sais à quels problèmes je vais être confronté (et que ces problèmes prennent le pas sur les autres, étant délibérément calibrés pour que je m'y fasse fondre les synapses), d'élaborer des ruses pour les contourner alors même que je ne suis pas en train de dessiner.

Ce qui au final m'amène à ne pas souffrir vraiment du syndrome de la page blanche, mais plutôt de celui du crâne dégarni à force de s'arracher les cheveux ("mais pourquoi bordel j'ai décidé de ne pas utiliser de noiiiiiir !!").

Bon effectivement, là l'exemple est pictural. Mais finalement, je vois pas mal de points communs entre les différentes pratique créatives (en tout cas dans le cheminement créatif, on va dire )

Tout à fait, je pense que ton exemple est très pertinent pour l'écriture... C'est une méthode intéressante, faudra que je teste En tout cas j'imagine bien la torture...

Dans un genre plus littéraire, et en partant du même principe, quand j'avais développé l'univers de feu mon jeuderôlesquineverrapaslejourparcequeçamefaitunprojetdetropàgérer, une bonne partie de l'univers était issue des causes et des conséquences d'un simple parti pris : Las des elfes toujours beaux, nobles, etc, j'avais décidé que les elfes seraient d'anciens esclaves, considérés comme des gros sociopathes, vivant reclus plus par exclusion que par exil volontaire, et très loin du coté un peu grosse tata des elfes qu'on nous sert habituellement.

De ce simple axe, il a fallu décider qui avait pu les réduire en esclavage, comment ils s'étaient révoltés, comment avaient réagis les différentes factions en conséquence, comment ils s'étaient réorganisés, et comment, du fait de leur exclusion (donc dans des zones pas vraiment convoitées, pauvres en ressources et pas vraiment fertiles), comment, donc, ils se nourrissaient, tout simplement. Tout en essayant de conserver un aspect elfique à la chose, qui ne se limite pas à une simple paire d'oreilles pointues.

Et parce que j'aime me faire des pieds de nez à moi même, ils ont fini organisés en société matriarcale (héritage du temps ou ils étaient esclaves, quand les femelles étaient infiniment mieux traités, plus courtisanes de harem qu'autre chose, et avaient par conséquent accès à une éducation à laquelle les mâles ne pouvaient que rêver, blablabla).

De là ont découlé beaucoup d'autres éléments, tout simplement par interaction, et parce que l'idée appelle l'idée...

La contrainte, le pied de nez, ça oblige à jongler un peu mais c'est une source intarissable d'inspiration, directe ou indirecte ^^

Pour ma part, c'est rarement le manque d'inspiration qui m'arrête, mais la motivation qui avec la même fougue qu'elle s'était emparée de mon être, finit toujours par me fuir parfois en l'espace de quelques instants. Le plus fort est quand, hyper motivé, j'ouvre une page blanche dans mon éditeur de textes habituel, que je la regarde pendant 8 secondes, avant de la refermer aussitôt (Ou alors elle reste ouverte, histoire de dire je suis dessus, et je lance mon navigateur web habituel ou mon jeu vidéo habituel ).

En général l'inspiration me tombe dessus alors que je fais tout autre chose. Je marche dans la rue, ou je regarde un film, et là : Paf ! L'idée de génie germe dans mon esprit fertile et ne me quitte plus jusqu'à ce que, fébrile, je parviens à la noter sur un bout de papier (on pourrait aussi reparler des morceaux d'idées sur les papiers trainants incompréhensibles quelques jours plus tard et nous laissant perplexes )

En fait, ce qui m'arrête le plus souvent est, je l'admet, la flemme de coucher par écrit ce que j'ai dans l'esprit. J'ai des idées en tête de situations bien précises, de personnages etc. et le fait de devoir écrire ce qu'il se passe entre ces évènements m'ennuie bien souvent. C'est con, quand même .
Pourtant j'aime bien aussi rechercher la bonne phrase, la bonne expression ou figure de style, mais je ne parviens pas à écrire sur la durée.
Par exemple, sur mon roman qui n'avance pas du tout (tout juste s'il est commencé ), je sais parfaitement où je veux en venir dans l'action que je suis en train d'écrire, mais les étapes pour y parvenir m'ennuient rapidement. C'est pas très clair :\

C'est pour cette raison que je préfère le format de la nouvelle (souvent très courte) qui me permet d'arriver très rapidement à mes fins. Je suis rarement en manque d'inspiration sur ce format, l'histoire étant en général centré sur un seul concept, une seule idée. D'ailleurs, je suis en général assez motivé sur ce genre de récit, puisque je ne me fixe aucune contrainte de forme ou d'histoire. J'essaye des choses, souvent sans résultats probants, mais je me sens plus libre que dans un récit plus classique. Cette liberté de ton me motive et m'inspire suffisament pour que je finisse la nouvelle assez rapidement.
J'ai d'ailleurs remarqué que mes récits qui ont été terminés ont été écrits d'une traite, ou tout au moins pendant une période courte. Toutes les nouvelles qui me prennent plus d'une semaine ne sont (seront ?) pas terminées.

a part pour le dernier paragraphe je suis exactement dans le même cas que toi. Ca me rassure lol ^^

J'ai l'impression de me retrouver un peu dans chacune de vos réponses. Je suis un mélange de bordélisme et de flemmardise, cocktail un peu détonnant pour qui se targue d'écrire. La flemme se combat très simplement : on se prend par la main, et on s'y met, un point c'est tout. Le manque d'organisation est plus dur à gérer. Je n'arrive définitivement pas à écrire de synopsis, car j'ai beau réfléchir, je ne sais pas comment mon roman va se terminer. J'en connais certaines étapes-clés, aussi pour le rédiger j'emploie la même méthode que Frenzy : ces lieux et ces moments que je veux raconter fonctionnent comme des contraintes. Je dois trouver la cohérence, le fil directeur, qui mène de l'un à l'autre. C'est pourquoi quand j'ouvre mon traitement de textes, ce n'est jamais tout à fait en me disant "maintenant, j'écris". C'est plutôt : maintenant, je vais construire mon récit. Quelles sont les étapes manquantes? Si je suis bloquée, je me pose des questions simples : que ferait, logiquement, le personnage dans la situation où il est?

Ce qui est clair, c'est que ma façon d'écrire a beaucoup évolué. Je ne suis plus l'adolescente qui jetait ses mots au hasard sur une feuille blanche. J'ai envie de raconter une histoire, et pour ma part, elle ne pourra jamais se construire sur le coup de l'inspiration. J'écris des dizaines de passages sous le coup d'une inspiration subite, mais aujourd'hui j'apprends à faire les raccords, et à laisser tomber ce qui ne colle pas. J'ai appris la ténacité

Par ta faute, jai du chercher la traduction anglais français de procrastination, puis voyant que c'était un mot transparent, jai du chercher la définition... Erf !