C'est dur d'être aimé par des cons : Liberté d'expression

Alors le titre exact que je voulais mettre était "C'est dur d'être aimé par des cons" : Liberté d'expression, un peu beaucoup à la folie ? , mais j'ai été limité par un nombre de caractères.

Je viens de regarder le film de Daniel Leconte, "c'est dur d'être aimé par des cons", sur le procès dit "des caricatures", intenté à Charlie Hebdo en 2006 par l'UOIF, la ligue islamiste mondiale et la Mosquée de Paris, suite à la publication des caricatures de Mahomet.
Vous devez probablement vous en souvenir, mais ces caricatures avaient tout d'abord été publiées par un journal Danois, le Jyllands-Posten. le directeur de ce dernier avait organisé un concours de dessins sur le sujet " comment voyez vous Mahomet" en réaction à de divers attentats terroristes (Madrid, Londres, 11/09).
La publication de ces caricatures a provoqué un tollé dans le monde musulman, essentiellement à cause du fait que des photos choquantes (genre un type habillé en imam portant un nez de cochon en plastique) ajoutés par les intégristes "pour mettre de l'huile sur le feu" (expression chère à Chirac lors de la publication des caricatures).



En France seuls 3 journaux ont publié ces caricatures : France soir, L'Express et Charlie Hebdo.



A la veille de la sortie de l'Express, Serge Dassault, alors propriétaire du journal, a tenté de faire pression sur le directeur de la publication de l'époque (qui a démissionné le lendemain même) pour ne pas qu'il publie les caricatures. La raison invoquée : 15 jours plus tard, Dassault partait avec Chirac en Arabie Saoudite et il risquait de ne pas pouvoir vendre ses rafales. Cependant, comme le journal était déjà en train d'être imprimé, Dassault a renoncé à ne pas les publier car cela risquait de lui faire perdre près d'un million d'euros. Il a revendu le journal peu de temps après.



Charlie Hebdo a cité différents témoins à la barre dont Mohamed Sifaoui, Hollande, Bayrou, le directeur de la publication de l'express et bien d'autres, et reçu par lettre le soutien pour le moins inattendu de Sarkozy. "Le procès de Charlie Hebdo, qui s’est tenu au Tribunal de grande instance de Paris du 7 au 8 février, a abouti à la relaxe, requise par le procureur de la République, et prononcée le 22 mars." (wikipédia).

Le but de Philipe Val et de toute l'équipe de Charlie en publiant ces caricatures était tout simplement de défendre la liberté d'expression. Et comme l'ont dit un certain nombre de personnes, si Charlie avait été condamné, "on aurait plus vécu dans la même France", celle de la loi de 1905, de la laïcité, des droits de l'homme et donc, de la liberté d'expression.

J'ai été soulagé de ce verdict, pour les raisons que vous imaginez, et qui sont entre autres celles citées ci-dessus.

Tout cela m'amène à me poser de nouveau cette question, sur laquelle je gamberge depuis des années : la liberté d'expression doit-elle être totale, comme aux USA, où même les nazis, les négationnistes et autres pédophiles ont le droit de s'exprimer, ou "restreinte" (j'appuie sur l'importante des guillemets, car dire d'une liberté qu'elle est restreinte va à l'encontre du principe même de liberté), c'est à a dire que l'on condamne juridiquement certains propos (antisémitismes, pédophilie, négationnisme, racisme etc).

Je suis sûr que, pour une raison ou pour une autre, vous y avez réfléchi. J'attends vos réactions.

Je suis partisan d'une liberté d'expression globale.

A la grande époque anti le pen, dans les années 90, j'étais horrifié du nombre de pétition qui tournaient pour la dissolution du front national. Non pas que j'ai la moindre sympathie pour ce parti, loin de là, juste que j'aurais trouvé aberrant que des idées pouvant rallier 20% de l'électorat puissent être passées sous silence. En fait ce n'est même pas une question de pourcentage, une idée qui est passée sous silence pour le politiquement correct, ça gangrène le reste. C'est globalement le cas de tout ce qu'on s'amuse à passer sous silence.



Sinon, pour la partie religieuse de la chose, nul autres que les musulmans n'ont à suivre le dogme islamique. On peut manger du porc, boire de l'alcool, et faire des caricatures de mahomet si ça nous chante. Donc pour moi c'est de l'ordre du non lieu direct.

Et dans tous les cas, ce n'est pas à la liberté d'expression de payer le prix du manque de second degré des minorités offusquées (parce que je ne pense pas que le "tollé dans le monde musulman" ait vraiment eu cette ampleur. Comme d'hab en fait, c'est pareil pour les juifs, les handicapés, les homos, les femmes, les animaux, etc, il suffit qu'une ou deux associations montent au créneaux pour faire de n'importe quel événement un scandale, même si la majorité de la communauté visée s'en fout)...

Autoriser les néonazis, négationnistes, homophobes et autres groupuscules que la morale condamne à s'exprimer, c'est aussi se donner un droit de réponse face à eux, qui débouche sur une certaine éducation des masses. Condamner une idée en se contentant de dire "c'est pas bien" ou "c'est interdit", ça revient à verrouiller le débat, et ça ne correspond pas du tout à ma vision de la démocratie...

Je suis assez d'accord avec toi à 90%, ceci dit penses-tu vraiment que l'on doive légaliser les associations pédophiles comme il en existe aux USA ? Car il s'agit dans ce cas d'un tout autre débat que la politique.

Je classe plus volontiers la pédophilie dans les maladies mentales que dans les préférences sexuelles...

De là, à moins que les buts de l'association n'aillent dans ce sens (intervention juridique pour un suivi psychiatrique, ce genre de choses), effectivement, ça coince, de mon point de vue. Ça ne me pose aucun problème tant que la pédophilie demeure considérée comme un crime, et qu'on cherche pas a la réhabiliter. D'autant que la pédophilie reste un viol, ou en tout cas un atteinte à la sexualité (par abus de confiance plutôt que par abus de pouvoir, mais au fond ça ne change pas grand chose).

Être raciste, homophobe ou fasciste ne soulève pas la même "part" de crime, il y a derrière une grosse part culturelle et/ou politique, et on connait tous quelques racistes passifs, qui se contentent de ne pas aimer les africains/les juif/les maghrébins/les manouches (rayez les mentions inutiles), en faisant d'eux les boucs émissaires de tous leurs problèmes lors des discussions de comptoir, mais ça ne leur viendrait même pas à l'idée de chercher à leur nuire plus avant.

Mais bon, à choisir, il vaut mieux être complètement misanthrope, primo on ratisse plus large, secundo c'est pas vraiment condamné par la morale, et tertio, c'est quand même vachement plus classe. Par contre on tombe dans une certaine dichotomie dès qu'il s'agit de monter une association de défense des droits des misanthropes...

Hmm effectivement les associations pédophiles nord américaines ne réclament pas un suivi médical, mais le droit que leur sexualité détraquée soit reconnue et légalisée... ! Beurk... Au pilori sur la place publique, jetons leur des tomates pourries, et autres. Je reste poli.

C'est intéressant ce que vous racontez Au passage, merci pour les fameuses caricatures, que je n'avais jamais vues, et que j'ai trouvé très drôles !
Je trouve que c'est facile de se cacher derrière la liberté d'expression dans certains cas, et je suis contente qu'en France, on puisse porter plainte parce qu'on nous a insulté. Avoir un recours en justice, que la société reconnaisse qu'on n'a pas à supporter un outrage verbal, ça je trouve ça bien. Bien évidemment, ce genre de loi est très problématique, puisqu'il faut savoir s'il y a eut outrage ou pas. C'est au bon sens d'en juger, et on ne peut qu'espérer que les autorités compétentes en fassent preuve... Comme dans cette histoire de caricatures... Je pense que des fois faut arrêter la connerie, et que c'est pas une simple opinion personnelle que de penser que c'est une chose de traiter quelqu'un de terroriste parce qu'il est un peu basané, et une autre que de rire en grossissant un trait que tout le monde avait déjà remarqué. Avoir recours à une soi-disant liberté d'expression quand on manque de respect, je trouve ça hypocrite. Crier au loup parce qu'on a osé vous tourner en dérision, c'est hypocrite aussi. Finalement, il n'y a guère matière à débat. Le sujet ici, c'est peut-on rire de la religion ? Bien évidemment, puisqu'on a attendu le vingtième siècle pour se poser la question. Ce qui est en jeu, c'est plutôt rire du monde musulman, ce qui est moins aisé au vu des relations tendues avec le monde occidental. Mais ne pas en rire serait à mon avis beaucoup plus grave que le contraire.